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nous retournons pour la regarder s’éloigner : ainsi vue de dos, avec ses épaules voûtées, son cou qui se penche en avant, ses oreilles qui s’écartent, elle nous fait l’effet maintenant de quelque colossal singe primitif, somnolent et mélancolique.



Par des sentiers nouveaux, nous nous retrouvons assez lestement dans la grande avenue vide, au pied du temple des « Huit-Drapeaux » où les bonzes gardiens viennent de rentrer.

Franchissons les premiers portiques de granit, dont les architraves doubles se retroussent par les pointes en croissant de la lune.

Entrons dans les jardins tristes, où l’herbe a effacé les allées. Le temple est là, noir et rouge, au-dessus de nos têtes, assis sur la colline qui surplombe. Il jette son ombre sur ces jardins bas qu’on n’entretient plus, où les immenses bassins à lotus ont pris des airs de marécages, où les arbres qui, jadis, avaient été tailladés, contournés, rendus nains par des procédés spéciaux, ont gardé dans leur dernière vieillesse des tournures rabougries et étranges.

Un escalier de granit, gigantesque, d’une soixantaine de marches, nous élève à mi-côte, jusqu’à la première cour où se faisaient les danses