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gigantesques : les cèdres japonais, qui sont aussi droits que les colonnes des temples et dont les branches sont disposées d’une manière symétrique comme des bras de candélabre. Des avenues désertes et envahies par les herbes s’ouvrent de droite et de gauche dans l’imposante futaie. Çà et là apparaissent des portiques sacrés, d’aspect très ancien, à demi perdus sous les sombres ramures, et des bassins d’eau dormante, tout remplis de lotus. — Alors les coureurs qui vous roulent, s’arrêtent et se retournent pour vous annoncer que vous entrez dans Kamakura, — qui fut jadis une ville immense.

« Vers le XIe siècle, nous disent les vieux livres peints à l’encre de Chine, — bien avant Yeddo la capitale contemporaine, — avant la sainte Kioto qui l’a précédée, — florissait Kamakura, qui fut pendant quatre cents ans la résidence des puissants princes du Japon. »

— Mais, où est-elle donc, cette ville que les coureurs annoncent ? On regarde autour de soi, dans les profondeurs du bois, et on n’aperçoit rien.

— Inutile de chercher les maisons, répondent les coureurs ; il n’y en a plus. Les temples seuls sont restés debout, par-ci, par-là sous l’envahissement vert, et les avenues se voient encore, à peu près tracées, mais vides et silencieuses à présent. La capitale, qui fut si grande, si bruyante et si luxueuse, où le grand Yoritomo