Page:Loti - Japoneries d’automne, 1926.djvu/112

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Au milieu des rizières fauchées, des mils fauchés et encore verts, notre chemin ne monte ni ne descend : nous sommes toujours en plaine, mais toujours resserrés entre ces mêmes collines qui nous enferment comme des murailles. Séparément chaque petite vallée a beau être riante, fraîche, l’ensemble est inquiétant et un peu triste, — à cause de cette impression que l’on a, d’en laisser derrière soi tant d’autres semblables, desquelles il faudra ressortir par ce même et unique sentier. Elles se suivent, se croisent, s’enchevêtrent en labyrinthe, et, à la longue, cela oppresse de se sentir enfoncer de plus en plus dans ce pays muré, sans horizon, sans vue…

… À un détour du chemin, un peu endormis que nous sommes par la monotonie du voyage et par les cahots de nos chars, nous éprouvons tout à coup une grande indignation (dans la première minute de surprise, bien entendu, avant d’avoir eu le temps de comprendre) : devant une maison isolée, un vieux et une vieille, pour les manger sans doute, font cuire deux petites filles !… Une grande cuve de bois pleine d’eau est près d’eux, posée sur un trépied, au-dessus d’un feu de branchages très clair ; dedans, ces deux petites filles, de six ou huit ans, dont les têtes émergent encore et nous apparaissent à travers une légère fumée !…

Tout simplement, elles prennent un bain… que