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que chose de sombre et d’informe, dans la demi-obscurité de ce lieu magnifique ; quelque chose qui se soulève irrégulièrement comme une grande vague noire, figée ; un rocher sauvage, une cime de montagne…

C’est le sommet du mont Moriah, sacré pour les israélites, pour les musulmans et pour les chrétiens ; c’est l’aire d’Ornan, le Jébuséen, où le roi David aperçut l’ange exterminateur « tenant en main une épée nue tournée contre Jérusalem ». (II Rois, XXIV, 16. — I Paralipomènes, XXI, 16.)

David y fit l’autel des holocautes (I Paralipomènes, XXII, 1) et son fils Salomon y bâtit le temple, nivelant à grands frais les alentours, mais respectant les irrégularités de cette cime parce que les pieds de l’ange l’avaient frôlée. Salomon commença donc à bâtir le temple du Seigneur sur la montagne de Moriah, qui avait été montrée à David son père, et au lieu même que David avait disposé dans l’aire d’Ornan, le Jébuséen. (II Paralipomènes, III, 1.)

Dans la suite des âges, on sait de quelles magnificences inouïes et de quelles destructions acharnées cette montagne de Moriah devint le centre. Le temple qui la couvrait, rasé par Nabuchodonosor, rebâti au retour de la captivité de Babylone, détruit de nouveau sous Antonius IV, fut réédifié encore par Hérode, — et vit alors passer Jésus, l’entendit parler