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empires ; le détail consacre le souvenir des grandes guerres exterminatrices, des sacs horribles, des journées où le sang coulait ici comme de l’eau et où les égorgements « ne finissaient que quand les soldats étaient fatigués de tuer ».

Il y a surtout ce kiosque bleu, voisin de la mosquée bleue, qui raconterait à lui seul l’effroyable passé de Jérusalem. Sa double rangée de colonnes de marbre est comme un musée de débris de tous les temps ; on y voit des chapiteaux grecs, romains, byzantins ou hébraïques ; d’autres, d’un âge imprécis, d’un style sauvage et presque inconnu.

Maintenant, la tranquillité de la mort est descendue sur tout cela ; les restes de tant de sanctuaires ennemis ont été groupés, en l’honneur du Dieu de l’Islam, dans une harmonie inattendue, — et peut-être définitive, jusqu’à l’époque de la poussière finale… Et quand on se remémore les tourmentes passées, c’est étrange, ce silence d’à présent, ce délaissement, cette suprême paix, au milieu d’une esplanade de dalles blanches envahies par les marguerites et les herbes des champs…



Entrons dans la mosquée mystérieuse, si entourée d’espace désert et mort.