Page:Loti - Jérusalem, 1895.djvu/74

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rentes, sont tellement mêlés ici, qu’il en résulte de continuels déplacements de prêtres et de cortèges ; ils fendent les foules, portant des ostensoirs et précédés de janissaires en armes qui frappent les dalles sonores du pommeau de leur hallebarde… Place ! ce sont les Latins qui passent, en chasuble d’or… Place encore ! c’est l’évêque des Syriens, longue barbe blanche sous une cagoule noire, qui sort de sa petite chapelle souterraine… Puis, ce sont les Grecs aux parures encore byzantines, ou les Abyssins au visage noir… Vite, vite, ils marchent dans leurs vêtements somptueux, tandis que, devant leurs pas, les encensoirs d’argent, que des enfants balancent, heurtent la foule qui se bouscule et s’écarte. Dans cette marée humaine, une espèce de grouillement continu, au bruit incessant des psalmodies et des clochettes sacrées. Presque partout, il fait si sombre qu’il faut avoir, pour circuler, son cierge à la main, et, sous les hautes colonnes, dans les galeries ténébreuses, mille petites flammes se suivent ou se croisent. Des hommes prient à haute voix, pleurent à sanglots, courant d’une chapelle à l’autre, ici pour embrasser le roc où fut plantée la croix, là pour se prosterner où pleurèrent les saintes Marie et Madeleine ; des prêtres, tapis dans l’ombre, vous appellent d’un signe pour vous mener par de