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basiliques, et qui ont été rasées, comme celles de l’église Saint-Étienne, à de lointaines et douteuses époques ; tout est amoncellement de débris, dans cette ville qui a subi vingt sièges, que tous les fanatismes ont saccagée.

Les hautes murailles, en pierres d’un brun rougeâtre, qui forment les côtés de la place, sont des couvents ou des chapelles — et on dirait des forteresses. Au fond, plus haute et plus sombre que tout, se dresse cette masse effritée, brisée, qui est la façade du Saint-Sépulcre, et qui a pris les aspects, les irrégularités d’une grande roche ; elle a deux énormes portes du xiie siècle, encadrées d’ornements d’un archaïsme étrange ; l’une est murée ; l’autre, grande ouverte, laisse voir, dans l’obscurité intérieure, des milliers de petites flammes. Des chants, des cris, des lamentations discordantes, lugubres à entendre, s’en échappent avec des senteurs d’encens…

La porte franchie, on est dans l’ombre séculaire d’une sorte de vestibule, découvrant des profondeurs magnifiques où brûlent d’innombrables lampes. Des gardiens turcs, armés comme pour un massacre, occupent militairement cette entrée ; assis en souverains sur un large divan, ils regardent passer les adorateurs de ce lieu, qui est toujours, à leur point