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souffrant de la faim, et laissant des morts sur la route…

À mesure qu’on approche, les objets d’Orient dans les échoppes font place à des objets d’obscure piété chrétienne : chapelets par milliers, croix, lampes religieuses, images ou icones. Et la foule est plus serrée, et d’autres pèlerins, des vieux moujiks, des vieilles matouchkas, stationnent pour acheter d’humbles petits rosaires en bois, d’humbles petits crucifix de deux sous, qu’ils emporteront d’ici comme des reliques à jamais sacrées…

Enfin, dans un mur vieux et fruste comme un rocher, s’ouvre une porte informe, tout étroite, toute basse, et, par une série de marches descendantes, on accède à une place surplombée de hautes murailles sombres, en face de la basilique du Saint-Sépulcre.

Sur cette place, il est d’usage de se découvrir, dès que le Saint-Sépulcre apparaît ; on y passe tête nue, même si l’on ne fait que la traverser pour continuer sa route dans Jérusalem. Elle est encombrée de pauvres et de pauvresses, qui mendient en chantant ; de pèlerins qui prient ; de vendeurs de croix et de chapelets, qui ont leurs petits étalages à terre, sur les vieilles dalles usées et vénérables. Parmi les pavés, parmi les marches, surgissent les socles encore enracinés de colonnes qui jadis supportaient des