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mi-hauteur des colonnes superbes, couve une sinistre odeur humaine : odeur de misère, de pourriture, de cadavre, dont ces voûtes sont constamment remplies et qui, à l’époque des grands pèlerinages, devient lourde comme celle des champs de bataille au lendemain des déroutes. Elle est pour nous redire notre néant, cette odeur souillant cette magnificence, pour nous rappeler les immondices dont notre chair est pétrie ; elle est évocatrice des plus sombres pensées de mort…

Ce soir, d’ailleurs, aucune lueur un peu douce ne descend dans le noir de ma détresse infinie ; je ne sais plus voir ici que l’entassement séculaire des traditions byzantines et puis romaines ; rien ne s’éveille en moi qu’une immense pitié pour ces simples et ces confiants, pour ces vieux, pour ces vieilles presque sans lendemain qui, tout le jour, sont venus prier, pleurer, espérer — et qui déjà traînent avec eux la fétidité des cimetières…

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Avant-hier, ont pris fin les fêtes musulmanes du Baïram et le mince croissant du nouveau mois lunaire commence presque à éclairer les nuits.