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enténébrée aujourd’hui par tous les nuages des lointains, par tout ce qui pèse là-bas de lourd et d’opaque sur la rive du Moab.

Les quelques maisonnettes blanches de Jéricho peu à peu se dessinent, dans le vert de l’oasis, à mesure que nous descendons de nos sommets pierreux, inondés de soleil. On dirait à peine un village. Il n’y a plus vestige, paraît-il, des trois cités grandes et célèbres qui jadis se succédèrent à cette place et qui, à des âges différents, s’appelèrent Jéricho. Ces destructions, ces anéantissements si absolus des villes de Chanaan et de l’Idumée sont presque pour confondre la raison humaine. Vraiment, il faut que, sur tout cela, ait passé un bien puissant souffle de malédiction et de mort…

Quand nous sommes tout en bas dans la plaine, une accablante chaleur nous surprend ; on dirait que nous avons parcouru un chemin énorme du côté du sud, — et, tout simplement, nous sommes descendus de quelques centaines de mètres vers les entrailles de la terre : c’est à leur niveau abaissé que ces environs de la mer Morte doivent leur climat d’exception.