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S’il n’y avait la route carrossable sur laquelle nos chevaux marchent si aisément, on dirait presque, par instants, l’Idumée ou l’Arabie.

Elle est, du reste, pleine de monde aujourd’hui, cette route de Jéricho : des Bédouins sur des chameaux ; des bergers arabes menant des centaines de chèvres noires ; des bandes de touristes Cook, cheminant à cheval ou dans des chaises à mules ; des pèlerins russes, qui s’en reviennent à pied du Jourdain rapportant pieusement dans des gourdes l’eau du fleuve sacré ; des pèlerins grecs de l’île de Chypre, en troupes nombreuses sur des ânes ; des caravanes disparates, des groupements bizarres, que nous dépassons ou qui nous croisent.



Midi bientôt. Les hautes montagnes du pays de Moab, qui sont au delà de la mer Morte et que, depuis Hébron, nous n’avons pas cessé de voir, au Levant, comme une diaphane muraille, semblent toujours aussi lointaines, bien que depuis trois heures nous marchions vers elles, — semblent fuir devant nous comme les visions des mirages. Mais elles se sont embrumées et assombries ; tout ce qui traînait de voiles légers au ciel, dans la matinée,