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ma vie, je vais pénétrer — oh ! si anxieusement — dans ce lieu dont le nom seul, à distance, avait le grand charme profond, et je ne prévoyais pas tout ce monde, cet enterrement pompeux, ces gens quelconques attroupés là pour un spectacle…



D’abord, entrons dans la grotte dite de l’ « Agonie », — devenue aujourd’hui une chapelle à voûte de clocher, — qui passe, depuis le xive siècle, pour le lieu de l’agonie du Christ, mais qui, d’après une indiscutable tradition primitive, est l’abri où, la nuit de la Passion, sommeillaient les apôtres. Si tant d’autres lieux saints, à Jérusalem, ne sont que conjecturés et probables, celui-ci ne saurait être contesté, pas plus que le Gethsémani, d’ailleurs, qui, à aucune époque de l’histoire, n’a changé de nom.

Les petits autels, très antiques, très modestes et d’aspect délaissé, ne défigurent pas cette grotte, dont l’ensemble a dû peu varier depuis dix-neuf siècles. Par une nuit de printemps, froide comme va être celle qui s’approche ce soir, les apôtres dormaient là, les yeux appesantis d’un sommeil de fatigue et d’angoisse (Mathieu, XXVI, 40, 43 ; Marc, XIV, 40),