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mières terrasses, à nos pieds, appartiennent à de mystérieuses demeures. Nous surplombons de tout près un petit couvent de derviches hindous, dans lequel sont reçus et logés les pèlerins mahométans venus de l’Orient extrême ; c’est un assez étrange et misérable lieu, où des femmes et des chats rêvent en ce moment au soleil du soir, assis sur les vieilles pierres des toits. Au loin et du côté de l’ouest, s’en va le faubourg de Jaffa : les consulats, les hôtels, toutes les choses modernes, d’ici peu apparentes et auxquelles, du reste, nous tournons le dos. En suivant vers le sud occidental, viennent le quartier des Grecs, le quartier des Arméniens et le noirâtre quartier des Juifs : milliers de petits dômes pareils, d’aspect séculaire, avec quelques minarets, quelques clochers d’églises, tout cela renfermé, séparé de la campagne pierreuse et déserte par de hauts remparts aux crénelures sarrasines. Dans tout le sud-est, l’enceinte du Haram-ech-Chérif, sur laquelle nos yeux planent, étend ses solitudes saintes, où trône la mosquée bleue, isolée et magnifique ; au-dessus de ses murailles de forteresse, le Gethsémani, le mont des Oliviers, élèvent des cimes grises, et plus haut encore que tout cela, dans un presque irréel lointain, s’esquissent en bleuâtre les montagnes du pays de Moab. Elle est d’une tristesse et d’un charme