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mystère épaissi à plaisir autour de cette histoire et je partageais sa peureuse aversion.

Le seul possible auteur d’un pareil attentat ne pouvait être que cette figure passionnée et sombre, dont la silhouette seule justifiait tous les soupçons.

Mais qu’avait-il pu faire de cette misérable tête décollée de martyre ! dans une folie d’amour exaspéré, survivant au-delà de la tombe, l’avait-il arrachée à ce pauvre cadavre pour la faire embaumer, pour fixer à jamais dans les baumes et les onguents le visage charmant d’un être idolâtré ?

Au fond de quel comté des Trois-Royaumes, dans quel pavillon isolé de vieux parc seigneurial passait-il aujourd’hui ses dolentes journées à peigner les cheveux d’une tête de momie ? Dans quelle pièce obscure, à volets clos, et meublée avec un goût suggestif et bizarre baisait-il aujourd’hui, déjà vieux et cassé, les paupières recuites et les lèvres durcies d’un visage de morte macéré dans les fards !

Cette horrible vision m’a bien souvent éveillé la