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les glaces, les femmes en train de rajuster leurs masques et de rabattre sur leur front le capuchon de leurs dominos.

Jacques, très saoul, avait croisé ses deux bras sur la table, posé son front sur ses deux bras et il dormait, le pauvre, très pâle, et très joli quand même, à la lueur des bougies à leur fin et près de faire éclater leurs bobèches, pâle d’une pâleur de cadavre, mais joli d’une joliesse et vicieuse et éreintée de viveur à outrance, avec ses fines moustaches rouges retroussées et son impertinent profil de bretteur.

Suzanne s’était levée, et debout derrière lui, dans son grand domino de satin, qui l’allongeait et la grandissait encore, appuyait sa main gantée sur l’épaule. du dormeur pour l’éveiller et lui donner le signal de départ. « Il est plein comme un œuf », ricanait un des nôtres ; en effet, Jacques, vautré dans son ivresse, s’affalait un peu plus en avant sur la table et ne bougeait plus. Suzanne alors se dégantait, et par gentillesse, câlinerie de femme amoureuse, lui posait ses doigts nus sur la nuque, le grattant du bout de l’ongle dans les petits che-