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Le port est sur le papier, non encore dans la mer.

Mais la jetée est faite.

C’est l’une des promenades les plus agréables offertes aux pas de l’homme. J’ai vu souvent des audacieux s’y engager sur le coup de midi. Ils n’en revenaient pas. Au coucher du soleil, j’allais examiner, sur la terre rapportée, la trace que leur corps avait laissée en fondant…

On s’attaqua au chemin de fer. Jusqu’au kilomètre 310, les travaux se poursuivirent à coups de fusil. Les indigènes, les Issas, prenaient les rails pour un double serpent fabuleux qui s’allongeait chaque jour dans le but de piquer le cœur du pays. Deux chapelles, près de la gare de Djibouti, portent les noms des deux premiers Français tombés sur le ballast.

Le kilomètre 310 a sa responsabilité dans l’histoire : à peine est-il atteint que la guerre éclate en Europe. Alors les travaux deviennent pénibles. À mesure que les hommes blancs construisent, les hommes noirs démolissent. L’empire éthiopien ne veut pas aborder au rivage. « Voir la mer, c’est perdre sa race ».

La tête du double serpent est maintenant à Addis-Abeba, à huit cents kilomètres des trois rochers.