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de l’Exode. Le président Masaryk, qui, des premiers, vit dans le sionisme une goutte d’huile prophétique, sait très bien, lorsqu’il se rend à Mukacevo, à Ouzgorod, à Hust, que le gouverneur qui le reçoit n’est pas tout seul sur le quai de la gare. Un personnage immense, incommensurable accompagne le fonctionnaire. Il l’enveloppe tout entier de sa grande ombre. Sa taille domine les Carpathes, sa barbe balaye le sol et ses yeux enfoncés portent le long tourment d’un peuple : c’est Moïse !

Je voyage, à présent, avec deux Juifs sans barbe et sans papillotes. L’un est né à Vilna (Pologne), l’autre en Transylvanie. Mais ils sont sujets tchécoslovaques. Ils l’ont voulu. La Tchécoslovaquie est le seul pays qui reconnaisse aux Juifs le droit d’être des Juifs, comme les Slovènes sont des Slovènes, les Tchèques, des Tchèques. Ils prennent part à la vie nationale sans être obligés de s’assimiler. Si le ciel tchécoslovaque distribuait de la manne, les Marmaroches seraient une fausse Terre Promise, en attendant la vraie. Mais le ciel de ce pays est moins généreux que ses gouvernants. L’un de mes amis s’appelle Ben, l’autre, Salomon. Ce ne sont pas des orthodoxes. C’est-à-dire que, tout en respectant les saints livres, ils ne les mettent pas en pratique, qu’ils ont plus de confiance en la dé-