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le juif errant est arrivé

Et je fus précepteur chez des juifs hongrois. Je les suivis en vacances en Italie. Avec l’argent économisé, je m’arrêtai six mois à Grenoble où j’appris le français. Des Espagnols en villégiature à Uriage m’emmenèrent à Barcelone. Je vins à Vienne. De Vienne à Prague. Vous m’avez rencontré dans les Marmaroches. J’ai flairé partout et je n’ai pas encore trouvé mon os. Mon frère de New-York ne me fait pas signe. J’ai raté un départ pour le Brésil. J’ai trente ans et je couche encore sous les ponts des nations !

— On tâchera de vous trouver un lit, Ben.

— Heureux vos Juifs à vous qui se sentent chez eux ! Nous tous, ici, nous ne sommes pas chez nous. C’est pourquoi nous devons surveiller nos mouvements, nous tenir toujours comme en visite, être plus polis que quiconque. On dit que nous sommes obséquieux. Nous sommes simplement des hôtes où que nous soyons. Quand on est chez soi, dans sa demeure, on fait ce que l’on veut. On est libre de déjeuner en bras de chemise. Un invité, même un cochon d’invité comme nous, doit être plus correct. Savez-vous que les Juifs de ma catégorie sont les plus malheureux ? Les religieux attendent le Messie. Les assimilés deviennent lords en Angleterre ou députés