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le juif errant est arrivé

ces passages, de ces impasses, tout ce labyrinthe oriental tenant autant de l’Inde que de Damas et de Jérusalem. Ces caravansérails sans chameau, ces khans à la Kipling, braillards, gesticulants, carnavalesques, où tous les noms d’Israël dansent sur des enseignes, où l’aveugle-prophète tâtonne, où des vieillards, immobiles, le cou rentré, ont l’air de hérons dormant sur une patte, où d’autres lentement, lentement, semblent suivre une invisible procession ; ces entrées d’escaliers qui sont encore des boutiques ; ces caves d’où l’on vous crie : « Handel ! Handel ! je vends ! je vends ! » Ces ruisseaux où pataugent tous ces Levi, ces Lew, ces Lewis, ces Lewite, ces Levitan, ces Lewiston, ces Lewinstein, que ma présence émeut tellement ; tous ces regards où l’inquiétude chasse la curiosité et la curiosité l’inquiétude ; ces chevaux préhistoriques dont les squelettes traînent encore des fiacres clopinants et déménageurs ; ces étudiants de Yeschiba, encadrés de leurs papillotes savantes, et cherchant, en chapeau rond, l’improbable pain du soir ; ces jolies filles en loques sous le châle, le sachet de terre sainte au cou et qui suivront bientôt le marchand de Buenos-Aires ; ces porteurs chargés à la mode turque ; cette humidité embuant les murs, pénétrant les os ; ces innombrables yeux