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le juif errant est arrivé

dredi soir. Ils mangent en marchant, comme pressés par d’urgentes affaires. Celui-ci achète son preslé, mord dedans, mais s’aperçoit que d’autres dents longues ont déjà entamé son bien. Il le repose et en prend un neuf. Que restera-t-il de ce croissant au dernier qui passera ?

Le marché est le cœur du ghetto. Un amas de baraques comme celles que l’on construit après un tremblement de terre ou l’incendie d’une ville. Tremblement ou incendie doivent dater de loin ! Ces baraques sont branlantes. La vie est là, pourtant ! S’il tombe de la manne, elle tombera ici.

Handel ! Handel ! Je vends, crient tous ces Juifs. Je vends, je fais du commerce, j’ai de tout ! Je vends du vieux, évidemment, mais le vieux ne vaut-il pas le neuf ? L’âme seulement a besoin d’être belle, pure, intacte pour servir de miroir au Seigneur. Les beaux habits font-ils une belle âme ? L’Éternel regarde-t-il vos souliers, vos caftans ? Voilà des bas, des chaussettes qui n’ont plus de pied. Les bas ont-ils besoin de pied puisque vos pieds ont déjà des souliers ? Handel ! Je vends des caftans graisseux, ainsi pourrez-vous croire les avoir salis vous-mêmes en des banquets mémorables ! Co Pan Kupujé, que m’achetez-vous, monsieur ? On a envie de répondre : pour deux sous de