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— La dernière fois que je les ai embrassés, c’est à Lille. Ma femme me les a apportés à la prison. Et je vous le dis franchement, je voudrais bien les revoir. Maintenant c’est plus douteux. Vous allez comprendre ma situation.

» Le lendemain du tribunal secret, le copain que j’avais dans le jury m’avertit de la décision. Je m’en doutais. Il me désigna le camarade qui devait m’exécuter. Je n’avais plus de temps à perdre. Il me fallait sortir du pénitencier avant quatre jours. Alors, je suis entré dans le baraquement, je me suis mis à poil et j’ai lacéré mes effets. C’était l’envoi au conseil de guerre. Je m’en « mettais » ainsi pour deux ans de plus. Cela valait mieux que la mort, n’est-ce pas ?

Ma combine a réussi. Le soir même je quittais le baraquement pour le tombeau. J’étais à l’abri. Au bout de huit jours on m’a fait prendre le train pour Alger. J’ai passé le conseil. J’ai eu mes deux ans. Eh bien ! c’est comme si je n’avais rien fait !

Et s’adressant à l’agent principal :

— C’est bien après-demain que je dois rejoindre le pénitencier, mon adjudant ?