Page:London - Le Vagabond des étoiles.djvu/75

Cette page a été validée par deux contributeurs.
63
LA CAMISOLE DE FORCE

d’efforts dont j’étais témoin. J’en fis quelques observations à l’inepte chef du tissage, qui ignorait tout de son métier.

Furieux, il me fit appeler, lors d’une tournée d’inspection du capitaine Jamie, et exhiba à celui-ci, comme étant mon œuvre, des pièces d’étoffe ignobles. J’eus beau nier, je ne fus pas cru. Trois fois, la même exhibition se renouvela. Le troisième appel devait être puni selon les règlements. La punition se traduisit par vingt-quatre heures de camisole.

On me fit descendre aux cachots et je reçus l’ordre de m’étendre sur la toile, la face vers le sol. Je refusai. Alors, pour me faire céder, un des geôliers nommé Morrisson, m’enfonça ses pouces dans la gorge. Un autre, nommé Mobins, convict lui-même, mais passé homme de confiance, me frappa des poings, à plusieurs reprises. Finalement, je cédai et fis ce qu’on me demandait. Ma résistance avait déplu à mes bourreaux et, pour cela, ils serrèrent le lacet d’un cran de plus. Puis ils me roulèrent sur le dos, comme ils eussent fait d’une souche de bois.

La première impression ne me sembla pas bien terrible. Ils refermèrent, en s’en allant, la porte de mon cachot, firent basculer les leviers des verrous, en grand fracas et cliquetis, et me laissèrent dans l’obscurité complète. Il était onze heures du matin.

Pendant quelques minutes, je n’éprouvai rien d’autre qu’une incommode constriction de tout le corps, laquelle me parut devoir se calmer lorsque je m’y serais habitué.

Mais ce fut le contraire qui arriva. Mon cœur se mit à battre violemment et il me sembla que mes poumons étaient soudain, devenus impuissants à absorber une quantité d’air suffisante pour me permettre de respirer. Cette sensation d’étouffement que j’éprouvais était terrifiante. À chaque battement de mon cœur, il me semblait que celui-ci était près d’éclater et, à chaque aspiration, que mes poumons allaient se rompre.

Au bout d’une demi-heure (je n’avais pas encore l’ex-