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« ET QUOI ENCORE, VANDERVOOT ? »

De la dunette où il se tenait, Kwan-Yung-Jin baissa les yeux vers nous, sans paraître nous voir. Quant à Vandervoot, il ne fut plus connu parmi nous, bien des années durant, que sous le sobriquet : « Et quoi encore, Vandervoot ? » Pauvre bougre ! Il mourut gelé, une nuit, dans les rues de Keijo, sans trouver une porte qui s’ouvrît devant lui.

On nous débarqua sur le continent, où l’on nous jeta dans une prison puante, infectée de vermine.

Telle fut notre entrée sur le sol coréen et notre premier contact avec les fonctionnaires de ce pays. Mais je devais, pour tous mes compagnons, prendre une glorieuse revanche sur Kwan-Yung-Jin, le jour où, comme vous l’allez voir, Lady Om eut des bontés pour moi et où le pouvoir fut mien.

Nous demeurâmes dans cette prison de nombreux jours. Kwan-Yung-Jin avait envoyé un messager à Keijo, la capitale, afin de connaître quelle serait, à notre égard, la décision royale.

Entre temps, nous étions passés à l’état d’exhibition foraine. De l’aube au crépuscule, les barreaux de nos fenêtres étaient assiégés par les indigènes, qui jamais encore n’avaient vu de spécimens de notre race. Parmi ces badauds, il n’y avait pas que de la populace. D’élégantes ladies, portées en palanquins sur les épaules de leurs coolies, venaient considérer les diables étrangers vomis par la mer et, tandis que leurs serviteurs chassaient la foule vulgaire à coups de fouet, elles risquaient vers nous de longs regards timides. De notre côté, nous pouvions voir peu de leur visage, qui était voilé, selon la coutume du pays. Seules, les danseuses et les vieilles femmes circulaient dehors, la figure découverte.

J’ai souvent pensé que Kwan-Yung-Jin souffrait des nerfs et que, lorsque ceux-ci le tourmentaient particulièrement, il s’en prenait à nous. Quoi qu’il en soit, sans rime ni raison, chaque fois qu’il en avait le caprice, il ordonnait que nous sortions de prison et qu’on nous