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LA CARAVANE VERS L’OUEST

défaut. Seuls, quelques ravins, dont les rochers étaient plus dénudés, racontaient les anciennes pluies torrentielles qui les avaient lavés.

Notre chariot était l’unique qui fût attelé de chevaux. Les autres, qui formaient une longue file, pareille à un grand serpent, et que je découvrais dans son entier lorsque le chemin décrivait quelque courbe, étaient tirés par des bœufs. Il fallait trois ou quatre couples de ces animaux pour mouvoir, avec peine et lenteur, chaque chariot.

J’avais compté, dans une courbe, le nombre de ceux qui précédaient ou suivaient le nôtre. Il y en avait quarante, au total, le nôtre compris. Je recommençais mon décompte, à chaque courbe nouvelle, distraction d’enfant pour parer à son ennui et, au moment même où nous sommes, je revoyais les quarante gros véhicules couverts de toile, lourds et massifs, grossièrement façonnés, qui tanguaient et roulaient, grinçant et cahotant, sur le sable et les pierres, parmi les buissons de sauge, l’herbe rare et fanée, et les rochers.

À droite et à gauche de la caravane, qu’ils encadraient, allaient à cheval douze à quinze jeunes gens. En travers de leurs selles étaient posés leurs rifles à longs canons. Chaque fois que l’un d’eux s’approchait de notre chariot, je pouvais voir distinctement ses traits tirés et inquiets, pareils à ceux de mon père qui, comme eux, avait un long rifle à portée de sa main.

Ces cavaliers tenaient un aiguillon, dont ils se servaient pour piquer les bœufs attelés qui renâclaient. Une vingtaine, ou plus, de ces animaux squelettiques et boitant, la tête écorchée par le joug, avaient été détachés. Ils s’arrêtaient, de temps à autre, pour tondre quelque touffe d’herbe sèche, et les cavaliers les poussaient également de leurs aiguillons. Parfois, l’un des bœufs s’arrêtait pour meugler, et ce meuglement était non moins sinistre que le reste du décor.

Loin, très loin derrière moi, je me souvenais avoir