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qu’il eût souhaité pouvoir transporter sur une autre planète et qui n’était, hélas ! que trop près du rivage ! En y retournant, il v it déchirés, défigurés, dissipés, les mirages qui avaient enveloppé, circonscrit, embelli ses horizons ; il ne put donc, ni ne voulut les chanter, les idéaliser.

Pour le dire autrement, Chopin ne sentit pas le besoin de ressusciter ce passé ardent, qui empruntait aux latitudes méridionales leur feu et leur éclat ; dont les flammes exhalaient l’âcre saveur du bitume d’un volcan ; dont les explosions portaient parfois une terreur destructive sur les frais et rians versans d’une tendresse pleine de simplicité ; dont les laves brûlantes étouffaient et ensevelissaient à jamais les souvenirs d’une heure de joies naïves, innocentes et modestes. Par ainsi, celle qui croyait être la poésie en personne, n’a point inspiré de chant ; celle qui se croyait la gloire elle-même, n’a point été glorifiée ; celle qui prétendait que, comme un verre d’eau, l’amour se donne à qui le demande, n’a point vu son amour béni, son image honorée, son souvenir porté sur les autels d’une sainte gratitude ! Près d’elle, que de femmes qui ont seulement su aimer et prier, vivent à jamais dans les annales de l’humanité d’une vie transfigurée, soit qu’on les appelle Laure de Novès ou Eléonore d’Est, soit qu’elles portent les noms enchanteurs de Nausikaa ou de Sakontala, de Juliette ou de Monime, de ïhécla ou de Gretchen.

Mais non ! Durant cette existence dans une île transformée en un séjour des dieux, grâce aux hallucinations