Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/280

Cette page n’a pas encore été corrigée

la résurrection à la mort : celui de la transfiguration*. Le don de changer un passé incorrect, incomplet, fautif, brisé, en un avenir de glorification sans fin, pouvant durer tant que l’humanité dure.

Et l’homme et l’artiste peuvent être fiers de posséder de si divines puissances ! C’est en elles que gît le secret de la royauté native que l’homme, cet être chétif et misérable, exerce à bon droit sur l’incommensurable et sereine nature ; de la supériorité innée que l’artiste, cet être faible et impuissant, se sent à juste titre sur ses semblables ! Mais, l’homme n’exerce sa royauté qu’en cherchant le bien dans les limites du vrai ; l’artiste ne peut revendiquer sa supériorité qu’en renfermant seulement le bien sous les contours du beau. — Comme la plupart des artistes, Chopin n’avait point un esprit généralisateur ; il n’était guère porté à la philosophie de l’esthétique, dont, il n’avait même pas beaucoup entendu parler. Seulement, comme tous les vrais, les grands artistes, il arrivait aux conclusions du bien, vers lequel le penseur s’élève pas à pas sur les rudes sentiers où se cherche le vrai, par un vol vertical à travers les sphères transparentes et radieuses du beau.

Chopin se laissait posséder par la situation si neuve qui lui était faite à Majorque et dont il n’avait aucune expérience, avec cette ignorance et cetle imprévoyance des futures amertumes dont les germes sont semés et épars autour de nous, que nous avons tous plus ou moins connues dans ces charmantes années d’enfance,