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enchaînement de souffrances, de silences, de patiences, d’abnégations, de longanimités, d’indulgences et de courageuses persévérances, avait créé cet idéal, impérieux et résigné, admirable, mais triste à contempler, comme ces plantes à corolles roses dont les tiges, s’ent relaçant en un filet de longues et nombreuses veines, donnent de la vie aux ruines. La Nature, les leur réservant pour les embellir, les fait croître sur les vieux cimens que découvrent les pierres chancelantes ; beaux voiles, qu’il est donné à son ingénieuse et inépuisable richesse de jeter sur la décadence des choses humaines !

En voyant qu’au lieu de donner corps à sa fantasie dans le porphyre et le marbre, au lieu d’allonger ses créations en caryatides massives, dardant leur pensée d’en haut et d’aplomb comme les brûlans rayons d’un soleil monté à son zénith, l’artiste polonais les dépouillait au contraire de tout poids, effaçait leurs contours et aurait enlevé au besoin l’architecture elle-même de son sol, pour la suspendre dans les nuages, comme les palais aériens de la Fata-Morgana, Mme Sand n’en fut peutêtre que plus attirée par ces formes d’une légèreté impalpable, vers l’idéal qu’elle croyait y apercevoir. Quoique son bras eût été assez puissant pour sculpter la ronde bosse, sa main était assez délicate pour avoir tracé aussi ces reliefs insensibles, où l’artiste semble ne confier à la pierre, à peine renflée, que l’ombre d’une silhouette ineffaçable. Elle n’était pas étrangère au monde super-naturel, elle devant qui, comme devant