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mélancolique passion pour le beau, son front semblait déjà se marbrer de cette ombre fatale que l’éclat du désespoir n’explique toujours que trop tard aux hommes, si curieux des secrets du cœur et si inoptes pour les deviner.

Hiller y était aussi ; son talent s’apparentait à celui des novateurs d’alors, en particulier à Mendelssohn. Nous nous rassemblions fréquemment chez lui et en attendant les grandes compositions qu’il publia dans la suite, dont la première fut son remarquable oratorio, La Destruction de. Jérusalem, il écrivait des morceaux de piano : les Fantômes, les Réveries, ses vingt-quatre Etudes dédiées à Meyerbeer. Esquisses vigoureuses et d’un dessin achevé, rappellant ces études de feuillages où les paysagistes retracent d’aventure tout un petit poëme d’ombre et de lumière, avec un seul arbre, une seule bruyère, une seule touffe de fleurs des bois ou de mousses aquatiques, un seul motif heureusement et largement traité.

Eugène Delacroix, le Rubens du romantisme d’alors, restait étonné et absorbé devant les apparitions qui remplissaient l’air et dont on croyait entendre les frôlemens. Se demandait-il quelle palette, quels pinceaux, quelle toile il aurait eu à prendre, pour leur donner la vie de son art ? Se demandait-il si c’est une toile filée par Arachné, un pinceau fait des cils d’une fée, une palette couverte des vapeurs de l’arc-en-ciel, qu’il lui eût fallu découvrir ? Se plaisait-il à sourire en lui-même