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ont servi d’anneau dans la chaîne généalogique sans laisser d’autres traces de leur triste et terne passage !

D’ailleurs, en ce siècle de calomnies, on calomnie aussi les hommes là, où les femmes ont de quoi braver, vaincre et faire taire la calomnie. Si ces polonaises qui changent une fleur des champs en un sceptre dont on bénit la puissance, ont un sens de la foi plus sublime que les hommes, il n’est pourtant pas plus viril ; si elles ont le goût de l’héroïsme plus exalté, il n’est pourtant pas plus impérissable ; si l’orgueil de la résistance est plus indigné chez elles, il n’est pourtant pas plus indomptable ! Tout le monde dit du mal des polonais ; cela est si aisé ! On exagère leurs défauts, on a soin de taire leurs qualités, leurs souffrances surtout. Où donc est la nation qu’un siècle de servitude n’a point défaite, comme une semaine d’insomnie défait un soldat ? Mais, quand on aura dit tout le mal imaginable des polonais, les polonaises se demanderont toujours : Qui donc sait aimer comme eux ? S’ils sont souvent des infidèles, prompts à adorer toute divinité, à brûler leur encens devant chaque miracle de beauté, à adorer chaque jeune ;stre nouvellement monté sur l’horizon, qui donc a un cœur aussi constant, des attendrissemens que vingt ans n’ont pas effacé, des souvenirs dont l’émotion se répercute jusque sous les cheveux blancs, des services empressés qui se reprennent après un quart de siècle d’interruption comme on renoue un entretien brisé la veille ? Dans quelle nation ces êtres, frêles et