Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/558

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’habitants ; ils étendront sur toute l’Amérique centrale et méridionale leur population, leur constitution, leur culture et leur esprit, comme récemment ils l’ont fait à l’égard des provinces mexicaines limitrophes ; le lien fédératif unira entre elles toutes ces immenses contrées ; une population de plusieurs centaines de millions d’âmes exploitera un continent dont l’étendue et les ressources naturelles dépassent énormément celles de l’Europe ; et la puissance maritime du monde occidental surpassera alors celle de la Grande-Bretagne dans la même proportion que son littoral et ses fleuves surpassent le littoral et les fleuves britanniques en développement et en grandeur.

Ainsi, dans un avenir qui n’est pas extrêmement éloigné, la même nécessité qui prescrit aujourd’hui aux Français et aux Allemands de fonder une alliance continentale contre la suprématie britannique, commandera aux Anglais d’organiser une coalition européenne contre la suprématie de l’Amérique. Alors la Grande-Bretagne cherchera et trouvera dans l’hégémonie des puissances européennes associées sa sûreté et sa force vis-à-vis de la prépondérance de l’Amérique, et un dédommagement de la suprématie qu’elle aura perdue.

L’Angleterre fera donc sagement de s’exercer de bonne heure à la résignation, de se concilier par des concessions opportunes l’amitié des puissances européennes, et de s’accoutumer dès aujourd’hui à l’idée d’être la première parmi des égales[1].

  1. Dans un écrit composé peu de temps avant sa mort, List a émis des idées bien différentes de celles que développe ce chapitre. Renonçant au projet d’une alliance continentale, il se fait le promoteur d’une alliance entre l’Allemagne et l’Angleterre. Au moment de sa publication dans la Gazette d’Augsbourg en 1847, j’ai essayé d’apprécier ce curieux opuscule dans les termes suivants :
      « List lui-même nous apprend dans un court avant-propos comment il a été amené à composer cet écrit. C’est, dit-il, le résumé, la quintessence de ses études depuis la publication de son Système national, c’est-à-dire durant un espace de six années. Déjà, depuis un an, il s’occupait de réunir ses idées, et il avait l’intention de publier ce nouveau travail comme une suite de son précédent ouvrage, en recourant d’abord à la publicité de la Gazette