Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/534

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dustrie allemande est déjà parvenue, qui serait incapable de prévoir le brillant avenir de celle-ci, qui pourrait tromper la confiance que les industriels allemands ont placée dans la sagesse de leurs gouvernements et porter une profonde atteinte à l’esprit d’entreprise de la nation ; qui ne saurait pas distinguer le rang élevé qu’occupe une nation manufacturière de premier ordre d’avec l’humble situation d’un pays exportateur de blé et de bois ; qui ne comprendrait pas combien est précaire, même en temps ordinaire, un débouché étranger pour ces articles, avec quelle facilité des concessions dont elles auraient été l’objet peuvent être retirées, et quelles convulsions entraînerait une interruption de ce commerce causée par la guerre ou par des restrictions ; qui enfin n’aurait pas appris par l’exemple des autres grands États à quel point l’existence, l’indépendance et la puissance d’une nation dépendent de la possession d’une industrie manufacturière développée dans toutes ses branches.

En vérité, il faut tenir bien peu de compte de l’idée de nationalité et d’unité qui a surgi en Allemagne depuis 1830, pour croire avec l’auteur du rapport que la politique de l’Association se réglera sur les intérêts de la Prusse[1], par la raison que les deux tiers de la population y sont prussiens, que les intérêts de la Prusse réclament l’exportation de ses bois et de ses blés en Angleterre, que son capital manufacturier est insignifiant, que la Prusse, par conséquent, s’opposera à toute entrave à l’importation des produits fabriqués étrangers, que tous les chefs des départements ministériels y sont déterminés.

On lit cependant dans le commencement du rapport :

  1. Les intérêts de la Prusse sont loin d’être homogènes, ainsi qu’on le pourrait conclure du rapport de Bowring ; il faut distinguer soigneusement les intérêts des provinces manufacturières de l’Ouest ou en deçà du Wéser, qui sympathisent avec le midi de l’Association allemande et où les idées de protection prédominent, d’avec ceux de provinces de l’Est ou au delà du Wéser, et particulièrement des provinces agricoles de la Baltique qui exportent des blés et des bois en Angleterre, et où prévaut la doctrine de la liberté commerciale. Du reste, dans les conférences douanières du Zollverein, la Prusse s’est montrée protectionniste modérée, jamais ultra-libérale. (H. R.)