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sens que, depuis la constitution de l’union douanière, on se fait une idée plus nette de ce que veut dire en Angleterre le mot de liberté du commerce ; car depuis lors, comme le dit le docteur Bowring : « les idées du peuple allemand out quitté la sphère de l’espérance et de la fantaisie pour celle des intérêts positifs et matériels. »

Il dit avec raison que les lumières sont très-répandues en Allemagne ; c’est pour cela qu’on a cessé d’y poursuivre des rêves cosmopolites, qu’on y pense aujourd’hui par soi-même, qu’on s’en rapporte à son propre jugement, à son expérience personnelle, à son bon sens particulier plus qu’à des systèmes exclusifs que démentent toutes les expériences ; que l’on commence à comprendre pourquoi Burke, s’ouvrant à Adam Smith, lui déclarait qu’une nation doit être gouvernée, non d’après des systèmes cosmopolites, mais d’après une connaissance approfondie de ses intérêts ; c’est pour cela qu’on se défie en Allemagne de ces conseillers qui soufflent en même temps le froid et le chaud ; qu’on apprécie à leur juste valeur les avantages de rivaux industriels et leurs propositions ; qu’on se rappelle enfin, chaque fois qu’il est question d’offres de l’Angleterre, le mot fameux sur les présents des Grecs.

Il y a donc lieu de douter que des hommes d’État influents en Allemagne aient sérieusement fait espérer à l’auteur du rapport, que ce pays renoncerait à son système protecteur pour prix de la misérable concession de pouvoir faire en Angleterre quelques envois de blés et de bois. Dans tous les cas, l’opinion publique hésiterait à ranger ces hommes d’État dans la classe de ceux qui réfléchissent. Pour mériter aujourd’hui ce titre en Allemagne, il ne suffit pas d’avoir appris par cœur les phrases banales et les arguments connus de l’école cosmopolite ; on exige qu’un homme d’État connaisse les forces et les besoins du pays, et, sans se préoccuper des systèmes, s’applique à développer les premières et à pourvoir aux seconds. Celui-là trahirait une ignorance grossière de ces forces et de ces besoins, qui ne saurait pas quels immenses efforts ont été nécessaires pour porter l’industrie d’un pays au degré où l’in-