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la nature dans les affaires humaines, tandis qu’il faudrait l’abandonner à elle-même et la laisser agir librement afin qu’elle atteignit son but. Pour élever un État du dernier degré de barbarie au plus haut degré d’opulence, il ne faut que trois choses : la paix, des taxes modérées, et une administration tolérable de la justice ; tout le reste est amené par le cours naturel des choses. Tout gouvernement qui s’oppose à ce cours naturel, qui veut donner aux capitaux une autre direction ou arrêter la société dans ses progrès, se révolte contre la nature et devient, pour se maintenir, oppresseur et tyrannique. »

Cette pensée fondamentale servit de point de départ à Adam Smith, et ses travaux ultérieurs n’eurent d’autre but que de l’établir et de la mettre en lumière. Il y fut confirmé plus tard par Quesnay, Turgot et les autres coryphées de l’école physiocratique, dont il fit la connaissance en 1765 dans un voyage en France.

Évidemment Adam Smith voyait dans l’idée de la liberté du commerce la base sur laquelle il devait fonder sa réputation littéraire. Il est donc naturel que, dans son ouvrage, il se soit attaché à écarter et à combattre tout ce qui faisait obstacle à cette idée, qu’il se soit considéré comme le champion de la liberté commerciale absolue, qu’il ait pensé et écrit sous cette préoccupation.

Comment, avec cette idée préconçue, eût-il pu apprécier les choses et les hommes, l’histoire et la statistique, les mesures de gouvernement et leurs auteurs, d’un autre point de vue que celui de leur conformité ou de leur discordance avec son principe ?

Le passage de Dugald-Stewart qui vient d’être cité contient en germe tout le système d’Adam Smith. Le gouvernement ne peut et ne doit avoir d’autre tâche que de faire rendre une exacte justice et de lever le moins d’impôts possible. Les hommes d’État qui essaient de faire naître les manufactures, de développer la navigation, d’encourager le commerce extérieur, de le protéger à l’aide de forces navales, de fonder ou