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dans les pays voisins ou dans les contrées lointaines. De plus, la situation du pays est merveilleusement favorable et, à quelques égards, privilégiée pour le commerce intermédiaire. Déjà la facilité de connaître les idiomes, les lois, les institutions, la civilisation des trois nations limitrophes assurait aux Suisses de notables avantages pour ce commerce et pour tout le reste. La liberté civile et religieuse et la diffusion des lumières entretinrent parmi eux une vie, un esprit d’entreprise, qui, dans l’insuffisance de leur agriculture et de leurs ressources intérieures, les firent émigrer à l’étranger, où, par le service militaire, par le commerce et par toute sorte de professions, ils ramassaient une fortune pour la rapporter dans leur pays. Si, dans cette situation exceptionnelle, il s’est accumulé en Suisse des capitaux matériels et intellectuels pour faire marcher quelques industries de luxe[1] qui pouvaient vivre sans protection douanière avec les débouchés extérieurs, il n’en faut pas conclure que de grandes nations placées dans de tout autres circonstances puissent suivre le même système. Dans l’exiguïté de ses impôts la Suisse possède un avantage que de grandes nations ne peuvent acquérir qu’à la condition de se dissoudre en municipalités comme la Suisse, et d’exposer ainsi leur nationalité aux attaques des étrangers.

Que l’Espagne ait commis une extravagance en prohibant l’exportation des métaux précieux, lorsqu’elle en produisait avec surabondance, tout homme de sens le reconnaîtra. Mais

  1. La liberté a fait surgir en Suisse d’autres industries que des industries de luxe, de celles qui exigent le plus d’habileté et d’efforts, notamment la construction des machines et la filature du coton ; cette dernière a été aidée par le système continental ; toutes l’ont été par l’exiguïté des salaires dont se contentent des ouvriers souvent possesseurs d’un petit champ. Dans les débats récents auxquels a donné lieu en Suisse la centralisation des péages, ou, en d’autres termes, la substitution d’un tarif fédéral à une multitude de droits cantonaux, des demandes de protection ont été formées par quelques cantons manufacturiers de l’Est, mais elles n’ont pas été accueillies. En revanche, le nouveau système, à tous autres égards fort libéral, protège les vignobles du pays, en exigeant des vins étrangers, non-seulement un droit fédéral d’entrée, mais encore des taxes cantonales de consommation excédant celles qui se perçoivent sur les vins indigènes. (H. R.)