Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/447

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de la consommation aux frontières et des droits élevés sur les articles de luxe d’un faible volume. Mais l’expérience enseigne partout qu’avec une bonne organisation et un tarif sagement calculé, dans les grands États dont le territoire est bien arrondi, le but de la protection ne saurait être sensiblement contrarié par la contrebande. Pour ce qui est des frais de douane, la perception des droits fiscaux en absorbe déjà une grande partie, et l’école ne prétend pas que les grands États doivent se passer de ces sortes de droits.

L’école, du reste, ne rejette pas toute protection douanière.

Adam Smith permet dans trois cas la protection de l’industrie du pays : premièrement comme mesure de rétorsion, si une nation étrangère repousse nos marchandises et que nous ayons lieu d’espérer que nos représailles la décideront à retirer ses restrictions ; en second lieu, pour la défense nationale, dans le cas où les articles manufacturés nécessaires à cet effet n’auraient pas pu être produits dans le pays sous le régime de la libre concurrence ; troisièmement comme moyen d’égalisation, lorsque les produits étrangers se trouvent moins taxés que les produits nationaux. Say repousse la protection dans toutes ces hypothèses, mais il l’admet dans une quatrième, celle d’une industrie qui paraît pouvoir devenir assez avantageuse au bout de quelques années pour n’en avoir plus besoin.

C’est donc Adam Smith qui veut introduire dans la politique commerciale le principe de rétorsion, principe qui peut conduire aux mesures les plus insensées et les plus funestes, surtout si les représailles, ainsi que Smith le demande, doivent être retirées aussitôt que l’étranger consent au retrait des restrictions qu’il avait établies. Supposez que l’Allemagne se venge par des représailles des obstacles que l’Angleterre met à l’exportation de ses blés et de ses bois, qu’elle prohibe les objets manufacturés de celle-ci et fasse naître ainsi artificiellement une industrie manufacturière indigène, si l’Angleterre se décide à ouvrir ses ports aux blés et aux bois allemands, l’Allemagne devra-t-elle laisser périr une création qui a exigé