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trement que le commerce le plus actif avec l’étranger. Si l’importation des produits agricoles place l’étranger dans notre dépendance et lui ôte les moyens de fabriquer lui-même, nous nous mettons, par l’importation des produits fabriqués, dans la dépendance de l’étranger, et nous nous ôtons à nous-mêmes les moyens de devenir manufacturiers[1]. Si l’importation des denrées alimentaires et des matières brutes enlève à l’étranger de quoi nourrir et occuper sa population, celle des produits fabriqués nous dérobe l’occasion d’augmenter la nôtre ou de lui donner du travail. Si l’importation des denrées alimentaires et des matières brutes étend l’influence de notre pays sur le monde et nous fournît le moyen de commercer avec tous les autres peuples, celle des produits fabriqués nous place sous le joug de la nation manufacturière la plus avancée, laquelle nous traite à peu près suivant son bon plaisir, comme l’Angleterre fait du Portugal. En un mot, l’histoire et la statistique attestent la justesse de cette maxime formulée par les ministres de Georges Ier : que les Peuples sont d’autant plus riches et d’autant plus puissants qu’ils exportent plus d’articles fabriqués et qu’ils importent plus de denrées alimentaires et de matières brutes. On peut même établir que des nations entières ont péri pour n’avoir exporté que des denrées alimentaires et des matières brutes, et importé que des articles fabriqués.

Montesquieu, qui, mieux que personne avant lui et après lui, a su comprendre les leçons que l’histoire donne aux législateurs et aux hommes d’État, a parfaitement reconnu cette vérité, bien que l’économie politique fût trop peu avancée à

  1. L’étranger n’est pas dans notre dépendance, pour nous fournir des produits agricoles que souvent il pourrait vendre à un autre pays ou consommer lui-même. Nous ne sommes pas davantage dans la dépendance d’un peuple étranger, pour recevoir de lui des objets fabriqués que nous pourrions tirer d’ailleurs, ou que nous-mêmes, au besoin, nous pourrions produire. On ne conçoit de dépendance que là où il y a monopole. Cependant, il est vrai de dire avec l’auteur, que l’étranger pèse sur nous, lorsque, par une concurrence sans limites, il empêche notre développement industriel et nous prive ainsi des avantages attachés à ce développement. (H. R.)