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matières brutes, objets qui ne s’importent pas aisément de l’étranger et dont l’agriculture du pays possède le monopole naturel ; l’agriculture du pays, aurait, par conséquent, réalisé de bien plus grands bénéfices. La demande des produits agricoles auxquels le sol de la France est particulièrement approprié, serait, sous ce régime de liberté, beaucoup plus forte que celle qui a été créée artificiellement par la restriction. Un agriculteur n’aurait pas perdu ce que l’autre a gagné, l’ensemble de l’agriculture du pays y aurait gagné, et l’industrie manufacturière plus encore. La restriction n’a donc pas accru la puissance agricole du pays, elle l’a diminuée, au contraire, et elle a de plus anéanti cette puissance manufacturière, résultat du développement de l’agriculture du pays en même temps que de l’importation des denrées alimentaires et des matières brutes de l’étranger. On n’a obtenu par elle autre chose qu’une hausse de prix au profit des agriculteurs d’une localité, mais aux dépens de ceux d’une autre, et surtout aux dépens de la puissance productive du pays en général.

Les inconvénients de ces restrictions au commerce des produits agricoles sont plus apparents encore en Angleterre qu’en France. Les lois sur les céréales ont provoqué, il est vrai, la mise en culture d’une vaste étendue de terrains infertiles ; mais on se demande si sans elles ces terrains infertiles n’eussent pas été cultivés. Plus l’Angleterre eût importé de laine, de bois de construction, de bétail et de grains, et plus elle aurait vendu d’objets fabriqués, plus elle aurait pu entretenir d’ouvriers dans ses fabriques, plus se fût accru chez elle le bien-être des classes laborieuses. L’Angleterre aurait doublé peut-être le nombre de ses ouvriers. Chacun de ceux-ci en particulier aurait été mieux logé, aurait eu plus aisément un jardin pour sa récréation et pour les besoins de son ménage, se serait nourri beaucoup mieux lui et sa famille. Il est évident qu’un si fort accroissement de la population laborieuse, de son bien-être et de ses consommations aurait créé une demande énorme de ces denrées dont le pays pos-