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occasionnent, amène une plus-value des terrains jusque-là employés comme pâturages, la suppression des jachères et l’établissement de canaux d’irrigation ; celle des fruits et légumes transforme les champs en potagers et en vergers.

La perte que le pays purement agriculteur éprouve faute d’employer ses ressources naturelles, est d’autant plus forte que la nature l’a mieux doué pour les manufactures, et que son territoire est plus riche en matières brutes et en forces naturelles particulièrement utiles aux fabricants ; elle l’est surtout pour les pays accidentés et montagneux, moins appropriés à la culture sur une grande échelle, mais qui offrent aux industriels de la force hydraulique, des minéraux, du bois et des pierres en abondance, et aux fermiers des facilités pour faire venir les produits que les manufactures réclament.

La zone tempérée est propre aux fabriques et aux manufactures, et elle seule à peu près leur convient. Une température modérée est infiniment plus favorable que la chaleur au développement et à l’emploi des forces. Mais la rigueur de l’hiver, où l’observateur superficiel voit une disgrâce de la nature, est le plus puissant encouragement aux habitudes de travail opiniâtre, de prévoyance, d’ordre et d’économie. Un homme qui, durant six mois, ne peut obtenir de la terre aucun fruit, et qui, cependant, a besoin de certaines provisions pour se nourrir, lui et ses bestiaux, de certains vêtements pour se défendre contre le froid, ne peut manquer de devenir infiniment plus laborieux et plus économe que celui qui n’a à se garantir que de la pluie, et qui toute l’année vit dans l’abondance. C’est la nécessité qui produit l’assiduité au travail, l’économie, l’ordre, la prévoyance ; l’habitude et l’éducation en font ensuite une seconde nature. Le travail et l’épargne donnent la main à la morale, comme la paresse et la dissipation à l’immoralité, et sont une source féconde de force, comme celles-ci de faiblesse.

Une nation purement agricole, sous un climat tempéré, laisse, par conséquent, sans emploi la meilleure partie de ses ressources naturelles.