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social, et de même chaque pas rétrograde, chaque atteinte aux intérêts généraux se font partout sentir ; réfléchissez combien il est facile à cette population qui réside en un seul et même lieu de s’entendre sur un but commun et sur des mesures communes, et combien de ressources elle est en état de rassembler sur-le-champ ; voyez quelles relations étroites une communauté si puissante, si éclairée et si attachée à sa liberté entretient avec d’autres communautés semblables du même pays ; pesez tout cela, et vous serez aisément convaincus qu’en comparaison des villes dont toute la force, nous l’avons montré, repose sur la prospérité des manufactures et du commerce qui s’y rattache, la population rurale, dispersée sur toute la surface du territoire, ne peut, quelque nombreuse qu’elle soit, exercer qu’une faible influence sur la conservation et sur le perfectionnement des institutions publiques.

L’action prépondérante des villes sur le régime politique et civil de la nation, bien loin d’être préjudiciable aux habitants des campagnes, leur procure d’incalculables avantages. L’intérêt des villes leur fait un devoir d’appeler les agriculteurs au partage de leur liberté, de leur culture et de leur prospérité. Car plus ces richesses intellectuelles se multiplient parmi les habitants des campagnes, et plus s’accroit aussi la quantité des denrées alimentaires et des matières brutes qu’ils fournissent aux villes, et par conséquent celle des articles fabriqués qu’ils y achètent, plus augmente la prospérité des villes. La campagne reçoit des villes l’énergie, les lumières, la liberté et les institutions ; mais les villes s’assurent à elles-mêmes la possession de la liberté et des institutions, en faisant participer les habitants de la campagne à leurs conquêtes. L’agriculture, qui n’avait nourri jusque-là que des maîtres et des valets, donne alors à la société les champions les plus indépendants et les plus vigoureux de sa liberté. Dans l’économie rurale elle-même, alors, toute force peut se produire. L’ouvrier peut s’élever au rang de fermier, le fermier au rang de propriétaire. Les capitaux, ainsi que les moyens de transport que l’industrie manufacturière provoque et établit, fécondent