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C’est ce qui explique pourquoi, dans les pays purement agriculteurs, il peut y avoir de grandes villes, qui, malgré le nombre considérable de personnes riches et la variété des industries qu’elles renferment, n’exercent qu’une influence inappréciable sur la civilisation, sur la liberté et sur la force productive du pays. Les gens de métier y partagent nécessairement les opinions de leur clientèle ; on ne doit voir en eux que les domestiques des propriétaires et des fonctionnaires publics. À côté du grand luxe de ces villes, la pauvreté, la misère, l’étroitesse d’esprit et la bassesse des sentiments règnent parmi les habitants de la campagne. Les manufactures n’exercent, en général, sur la civilisation, sur le perfectionnement des institutions publiques et sur la liberté de la nation un effet salutaire, que là où, indépendantes des propriétaires et des fonctionnaires publics, elles travaillent, soit pour la masse de la population rurale, soif pour l’exportation, et achètent une grande quantité de produits agricoles pour les mettre en œuvre ou pour s’en nourrir. À mesure que cette saine industrie manufacturière se fortifiera, elle attirera à elle celle que les consommateurs dont on vient de parler avaient fait naître ; en même temps que les propriétaires, les employés de l’État et les institutions publiques se perfectionneront au profit de la communauté.

Considérez une grande ville où les manufacturiers sont nombreux, indépendants, amis de la liberté, instruits et riches, où les négociants ont les mêmes intérêts et la même situation, où les propriétaires se sentent obligés de se concilier l’estime publique, où les employés de l’État sont soumis au contrôle de l’opinion, où les savants et les artistes travaillent pour le grand public et tirent de lui leurs moyens d’existence ; considérez la masse des ressources intellectuelles et matérielles accumulées dans cet étroit espace ; remarquez l’intime union qui existe entre cette masse de forces sous la loi de la division des tâches et de l’association des forces productives ; songez avec quelle rapidité chaque amélioration, chaque progrès dans les institutions publiques et dans l’état économique et