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vers le monopole manufacturier du globe, en limitant l’importation des denrées alimentaires et des matières brutes. Au surplus, si les agriculteurs anglais, qui, durant la guerre, avaient eu la possession exclusive du marché intérieur, eussent été gravement affectés, au commencement, par la concurrence étrangère, plus tard, ainsi que nous l’expliquerons avec détail dans un autre endroit, ils auraient été largement dédommagés de leurs pertes par le monopole manufacturier que leur pays aurait obtenu.

Il ne serait que plus insensé de la part des nations manufacturières de second et de troisième ordre, chez lesquelles l’industrie a été appelée à la vie par vingt-cinq années de guerre et a été tellement consolidée ensuite par vingt-cinq années d’interdiction du marché anglais à leurs produits agricoles, qu’il ne lui faut plus peut-être que dix ou quinze ans d’une protection énergique pour soutenir la libre concurrence de l’industrie anglaise ; il ne serait que plus insensé, disons-nous, après les sacrifices d’un demi-siècle, de renoncer aux immenses avantages attachés à l’industrie manufacturière, et, du haut degré de culture, de prospérité et d’indépendance qui caractérise les pays à la fois agriculteurs et manufacturiers, de descendre au rang inférieur de peuples agriculteurs dépendants, par cela seul qu’il plaît aujourd’hui à l’Angleterre de reconnaître sa faute et de pressentir l’élévation prochaine des nations du continent qui rivalisent avec elle.

Supposez même que l’intérêt manufacturier en Angleterre acquière assez d’influence pour obliger à des concessions, en ce qui touche l’importation des produits agricoles, la chambre haute entièrement composée de grands propriétaires fonciers, et la chambre des communes où les gentilshommes de la campagne (country squires) sont en majorité, qui nous garantit qu’au bout de quelques années un nouveau ministère tory, dans d’autres circonstances, ne fera pas passer un nouveau bill des céréales[1] ? Qui nous répondra qu’une nouvelle

  1. On sait que l’intérêt manufacturier, avec Cobden pour athlète, a obtenu en effet ces concessions en 1846 ; on sait de plus que le ministère tory de