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trouver d’acheteurs pour le trop-plein de leur production agricole et d’être privés des articles fabriqués dont ils ont besoin. Un peuple purement agriculteur, nous l’avons déjà dit, est un individu qui n’a qu’un bras et qui se sert d’un bras étranger, dont le secours, toutefois, ne lui est pas toujours assuré ; un peuple à la fois agriculteur et manufacturier est un individu disposant de deux bras, qui lui appartiennent.

Une erreur fondamentale de l’école est de représenter le système protecteur comme une conception bâtarde de politiques spéculatifs. L’histoire est là pour attester que les mesures de protection ont eu pour causes, soit l’effort naturel des nations vers la prospérité, l’indépendance et la puissance, soit la guerre et les mesures hostiles de peuples manufacturiers et prépondérants.

L’idée d’indépendance et de puissance naît avec celle de nation. L’école n’en a tenu compte, parce qu’elle a pris pour objet de ses recherches, non point l’économie des différentes nations, mais l’économie de la société en général, c’est-à-dire du genre humain tout entier. Si l’on imagine toutes les nations réunies dans une confédération universelle, il n’y a plus à s’occuper de l’indépendance et de la puissance de chacune d’elles. La garantie de leur indépendance réside dans la constitution légale de la société universelle, de même, par exemple, que la garantie de l’indépendance des États de Rhode-Island et de Delaware réside dans celle de l’Union américaine. Depuis que celle union existe, ces petits États ne se sont jamais avisés de songer à l’accroissement de leur puissance politique, ni de se croire moins indépendants que les grands États avec lesquels ils sont unis.

Quelque conforme à la raison que soit l’association universelle, il serait insensé de la part d’une nation de régler sa politique dans l’attente de cette association et de la paix perpétuelle, comme si c’étaient déjà des faits accomplis. Nous le demandons, un homme de sens ne taxerait-il pas d’extravagance un gouvernement qui, confiant dans les avantages de la