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qui n’exerce plus ou moins d’influence sur l’accroissement ou sur la diminution de la puissance productive[1].

Si l’on présente le travail corporel comme la cause unique de la richesse, comment expliquerait-on ce fait, que les nations modernes sont incomparablement plus riches, plus populeuses, plus puissantes et plus prospères que les nations de l’antiquité ? Chez les anciens, il y avait, par rapport à la population totale, infiniment plus de bras occupés ; le travail était beaucoup plus rude ; chacun possédait plus de terre, et cependant les masses étaient beaucoup plus mal nourries, beaucoup plus mal vêtues que chez les modernes. Ce fait, nous l’expliquons par tous les progrès que le cours des siècles écoulés a vus s’accomplir dans les sciences et dans les arts, dans la famille et dans l’État, dans la culture de l’esprit et dans la capacité productive[2]. L’état actuel des peuples est le résultat de l’accumulation des découvertes, des inventions, des améliorations, des perfectionnements, des efforts de toutes les générations qui nous ont précédés ; c’est là ce qui constitue le capital intellectuel de l’humanité vivante, et chaque nation n’est productive que dans la mesure où elle a su assimiler cette conquête des générations antérieures et l’accroître par ses acquisitions particulières ; qu’autant que les ressources naturelles, l’étendue et la situation géographique de son territoire, le nombre de ses habitants et sa puissance politique lui permettent de cul-

  1. Say dit dans son Économie politique pratique : « Les lois ne peuvent pas créer des richesses. » Sans doute elles ne le peuvent pas, mais elles créent une force productive, qui est plus importante que la richesse ou que la possession de valeurs échangeables.
  2. Pour le développement de la puissance productive dans les sociétés modernes, je renvoie à la deuxième leçon du Cours d’économie politique de M. Michel Chevalier, année 1841-42. On y voit que l’accroissement de cette puissance productive, dans l’industrie du fer, est, depuis quatre ou cinq cents ans, dans le rapport de 1 à 25 ou à 30 ; que, dans la mouture du blé, le progrès a été dans le rapport de 1 à 144 depuis Homère ; que, dans la fabrication des tissus de coton, il est de 1 à 320 depuis 70 ans, et, dans la filature du lin, de 1 à 210 depuis quelques années seulement ; que, dans l’industrie des transports enfin, de l’autre côté de l’Atlantique, la force productive est dans le rapport de 1 à 11.500 comparativement avec ce qu’elle était dans l’empire de Montézuma. (H. R.)