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consumer dans les déserts de l’Asie et de l’Afrique pour étendre la suprématie manufacturière et commerciale, la littérature et la langue de l’Angleterre. Il ne s’écoulerait pas beaucoup de siècles avant que, dans ce monde anglais, on parlât des Allemands et des Français avec tout autant de respect que nous parlons aujourd’hui des peuples asiatiques.

Mais la politique trouve que ce développement au moyen de liberté du commerce est contraire à la nature ; si au temps des Anséates, c’est ainsi qu’elle raisonne, on avait établi la liberté générale du commerce, la nationalité allemande, au lieu de la nationalité anglaise, aurait pris les devants sur toutes les autres dans le commerce et dans les manufactures ; Il serait souverainement injuste d’attribuer aux Anglais, par des considérations cosmopolites, toute la richesse et toute la puissance du globe, uniquement parce qu’ils ont développé les premiers leur propre système commercial, et que, plus que tous les autres, ils ont méconnu le principe cosmopolite. Afin que la liberté du commerce puisse opérer naturellement, il faut d’abord que les peuples moins avancés qu’eux soient élevés par des mesures artificielles au même degré de développement où l’Angleterre est artificiellement parvenue. De peur que, en vertu de cette tendance cosmopolite des forces productives qui vient d’être indiquée, des contrées lointaines ne soient pas plus promptement mises en valeur que le continent de l’Europe, les nations qui se sentent, par leur état moral, intellectuel, social et politique, capables de devenir manufacturières, doivent recourir au système protecteur comme au plus sûr moyen d’atteindre ce but. Les effets du système protecteur sont ici de deux sortes : premièrement, en excluant peu à peu les produits étrangers de notre marché, nous déterminons dans d’autres pays un trop-plein de bras, de capacités industrielles et de capitaux qui sera obligé de chercher de l’emploi à l’étranger ; en second lieu, par les primes offertes à l’immigration des bras, des capacités industrielles et des capitaux, nous attirons chez nous ce trop plein de forces