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cette leçon que, dans l’état actuel du monde, une grande nation doit chercher avant tout dans le développement propre et harmonieux de ses forces particulières la garantie de sa prospérité et de son indépendance.

Ainsi, l’histoire enseigne que les restrictions sont beaucoup moins les créations de têtes spéculatives que les conséquences naturelles de la diversité des intérêts et de l’effort des peuples vers l’indépendance ou vers la suprématie, par conséquent des rivalités nationales et de la guerre, et qu’elles doivent cesser aussi avec ce conflit des intérêts nationaux ou par l’association des peuples sous le régime du droit. La question de savoir comment les peuples peuvent être réunis dans une fédération, et comment, dans les démêlés entre peuples indépendants, les arrêts judiciaires doivent être substitués à la force des armes, est donc l’équivalent de celle-ci : comment les systèmes nationaux de commerce peuvent-ils être remplacés par la liberté commerciale universelle ?

Les essais de quelques nations qui ont appliqué chez elles la liberté du commerce en présence d’une nation prépondérante par l’industrie, par la richesse et par la puissance, ainsi que par un système commercial restreint, par exemple ceux du Portugal en 1703, de la France en 1786, des États-Unis en 1786 et en 1806, de la Russie de 1815 à 1821, et de l’Allemagne durant des siècles, nous montrent qu’on ne fait ainsi que sacrifier la prospérité d’un pays, sans profit pour le genre humain en général, et pour le seul avantage de la puissance qui tient le sceptre des manufactures et du commerce. La Suisse, ainsi que nous le montrerons plus loin, forme une exception, qui prouve beaucoup et peu en même temps pour ou contre l’un ou l’autre système.

Colbert n’est pas, à nos yeux, l’inventeur du système auquel les Italiens ont donné son nom ; nous avons vu que les Anglais l’avaient élaboré longtemps avant lui. Colbert n’a fait que mettre en pratique ce que la France devait adopter tôt ou tard pour accomplir sa destinée. S’il faut adresser à Colbert un reproche, ce serait d’avoir essayé d’exécuter sous un gouver-