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ment des institutions politiques et sociales, et celles-ci, à leur tour, trouver dans l’accroissement des richesses matérielles et des forces productives des individus les éléments de leur perfectionnement ultérieur. L’essor de l’industrie et de la puissance de l’Angleterre ne date que de l’affermissement de sa liberté. L’industrie et la puissance des Vénitiens et des Anséates, des Espagnols et des Portugais se sont éclipsées avec leur liberté. Les individus ont beau être laborieux, économes, intelligents et inventifs, ils ne sauraient suppléer au défaut d’institutions libres. L’histoire enseigne, par conséquent, que les individus puisent la majeure partie de leur puissance productive dans les institutions et dans l’état de la société.

Nulle part l’influence de la liberté, de l’intelligence et des lumières sur la puissance, et, par suite, sur la force productive et sur la richesse du pays, n’apparaît plus clairement que dans la navigation. De toutes les branches de travail, la navigation est celle qui exige le plus d’énergie et de courage, le plus d’audace et de persévérance, qualités qui évidemment ne peuvent éclore que dans l’atmosphère de la liberté. Dans aucune autre l’ignorance, la superstition et le préjugé, l’indolence, la lâcheté et la mollesse ne sont aussi funestes ; nulle part le sentiment de l’indépendance personnelle n’est indispensable au même degré. Aussi l’histoire ne fournit-elle point d’exemple de peuple asservi qui ait excellé dans la navigation.

Les Indous, les Chinois et les Japonais se sont de toute antiquité bornés à naviguer sur leurs canaux, sur leurs fleuves, ou leurs côtes. Dans l’ancienne Égypte, la navigation maritime était réprouvée, apparemment parce que les prêtres et les monarques craignaient qu’elle ne donnât un aliment à l’esprit de liberté et d’indépendance. Les États les plus libres et les plus éclairés de la Grèce furent aussi les plus puissants sur la mer ; avec leur liberté cessa leur puissance maritime ; et l’histoire, qui raconte tant de victoires remportées sur terre par les rois de Macédoine, se tait sur leurs victoires navales.

Quand les Romains sont-ils puissants sur la mer, et quand n’entend-on plus parler de leurs flottes ? A quelle époque