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L’attachement à ses occupations favorites d’autrefois est toujours si profondément enraciné en elle, qu’encore aujourd’hui, bien qu’enrichie depuis longtemps par la charrue et par la navette, elle rêve de garennes et de droit de chasse dans les assemblées législatives, comme si le loup et la brebis, l’ours et l’abeille pouvaient vivre en paix l’un à côté de l’autre, comme si le sol pouvait servir à la fois au jardinage, à la culture des arbres, à un labourage intelligent, et à l’entretien de sangliers, de cerfs et de lièvres.

L’agriculture des Allemands demeura longtemps barbare, malgré l’incontestable influence que les villes et les monastères exerçaient sur leur voisinage.

Les villes s’élevèrent dans les anciennes colonies romaines, près des résidences des princes et des seigneurs spirituels et temporels, à côté des monastères, sur les domaines et autour des palais des empereurs, qui les favorisèrent, dans les lieux enfin où la pêche et les communications par terre et par eau en provoquaient la fondation. Les besoins locaux, le commerce intermédiaire étranger, tels furent à peu près leurs seuls moyens de prospérité. Pour qu’une industrie considérable et travaillant en vue de l’exportation eût pu y naître, il eût fallu de grands troupeaux de moutons et une culture du lin étendue. Mais la culture du lin suppose une industrie agricole avancée, et l’élève du mouton en grand, la sécurité vis-à-vis des loups et des voleurs. Le dernier point était impossible au milieu des éternelles querelles des nobles et des princes entre eux et avec les villes. Le bétail de pacage était toujours la première proie. De plus, avec les vastes forêts que, dans sa passion pour la chasse, la noblesse entretenait soigneusement, on ne pouvait songer à la destruction des bêtes féroces. Le peu de bétail qui existait, le défaut de sécurité légale, et le manque de capital et de liberté chez ceux qui maniaient la charrue, ainsi que d’intérêt pour l’agriculture chez les propriétaires du sol, arrêtaient nécessairement l’essor du travail agricole et, par suite, celui des villes.

En présence de cet état de choses, on comprend comment