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sement des forces productives d’un pays. Les capitaux matériels peuvent être consommés improductivement dans le sens étroit du mot, et cependant ces consommations provoquer dans les manufactures des efforts extraordinaires, des inventions nouvelles, des améliorations, et, en général, déterminer un accroissement de la puissance productive. Cette puissance productive est quelque chose de durable ; elle continue de s’accroître, tandis que les dépenses de guerre n’ont eu lieu qu’une fois[1], et de même il peut arriver dans des circonstances favorables telles que celles qui se sont rencontrées en Angleterre, qu’une nation gagne infiniment plus qu’elle ne perd à ces consommations jugées improductives par les théoriciens. Pour l’Angleterre, des chiffres l’établissent : ce pays a, pendant la guerre, acquis dans la seule fabrication du coton une puissance productive, qui donne annuellement une somme de valeurs de beaucoup supérieure à celle des intérêts qu’il paye pour l’augmentation de sa dette[2] ; je ne parle pas du vaste développement de ses autres branches d’industrie ni de l’accroissement de sa richesse coloniale.

Les guerres continentales, soit que l’Angleterre entretint des corps d’armée sur le continent, soit qu’elle lui fournît

  1. La dette publique de l’Angleterre ne serait pas un aussi grand mal qu’elle nous paraît aujourd’hui, si l’aristocratie anglaise consentait à ce que le fardeau en fût supporté par ceux auxquels les dépenses de guerre ont été si profitables, c’est-à-dire par les riches. D’après Mac-Queen, le capital des trois royaumes dépasse 4 milliards de liv. st. (100 milliards de francs), et Martin estime à environ 2 milliards 600 millions (65 milliards de francs) celui qui est employé dans les colonies. Il suit de là que le neuvième des fortunes privées suffirait au remboursement de toute la dette. Rien ne serait plus juste qu’un tel remboursement ou du moins que le paiement des intérêts de la dette publique au moyen d’une taxe sur les revenus. Mais l’aristocratie anglaise trouve plus commode d’y faire face par des impôts de consommation qui ont plongé les classes laborieuses dans une misère insupportable.
    (Note de l’auteur.)
      — On sait que sir Robert Peel a, en 1842, fait adopter une taxe sur les revenus, première condition de ses grandes réformes commerciales, et que cet impôt, établi pour trois années seulement, a été depuis continué, mais que l’expiration en est fixée à un terme prochain. (H. R.)
  2. On connaît le mot de Richard Arkwright, qu’avec les profits de ses fabriques de coton il paierait la dette de l’Angleterre. (H. R.)