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reils travaux ne peuvent être achevés que par un peuple dont l’industrie manufacturière commence à se développer sur une grande échelle ; que ces instruments dispendieux ne valent la dépense qu’ils occasionnent que dans un pays où l’industrie manufacturière et l’agriculture grandissent ensemble ; que dans un tel pays seulement ils remplissent convenablement leur office.

Sans doute, la puissance productive extraordinaire et la richesse colossale de l’Angleterre ne sont pas uniquement le résultat de la force matérielle de la nation et du labeur des individus ; le sentiment primitif de la liberté et du droit, l’énergie, l’esprit religieux et la moralité du peuple y ont concouru ; la constitution politique, les institutions, la sagesse et la vigueur du gouvernement et de l’aristocratie y ont leur part ; la situation géographique, la destinée du pays, d’heureux accidents même y ont aussi la leur.

Il est difficile de décider si les forces physiques agissent davantage sur les forces morales, ou les secondes sur les premières ; si les forces sociales agissent plus sur les forces individuelles ou celles-ci sur celles-là. Toujours est-il qu’elles exercent les unes sur les autres une énergique influence, que le développement des unes profite aux autres, et que les unes ne peuvent s’énerver sans que les autres s’énervent en même temps.

Que ceux qui cherchent l’origine de la grandeur de l’Angleterre exclusivement dans le mélange de la race anglo-saxonne et de la race normande, jettent un coup d’œil sur l’état de cette contrée avant Édouard III. Où étaient alors le travail et la bonne économie ? Que ceux qui la cherchent dans la liberté constitutionnelle veuillent bien se rappeler comment Henri VIII et Elisabeth traitaient leurs parlements. Où était alors la liberté constitutionnelle ? A cette époque les villes de l’Allemagne et de l’Italie jouissaient de la liberté individuelle dans une bien plus grande mesure que l’Angleterre.

Entre les autres peuples d’origine germanique, la branche anglo-normande n’avait conservé qu’un seul fleuron de liberté,