Page:List - Système national d'économie politique, trad Richelot, 2è édition, 1857.djvu/147

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le commerce des Villes Anséatiques n’était point national ; il n’était ni établi sur l’équilibre et sur le complet développement des forces productives du pays, ni soutenu par une puissance politique suffisante. Les liens qui unissaient les membres de la confédération étaient trop faibles ; le désir de la prépondérance et d’avantages particuliers, ou, comme parlerait un Suisse ou un Américain, l’esprit de canton, l’esprit d’État, était trop puissant, et bannissait le patriotisme fédéral, qui seul eût put faire prévaloir les intérêts généraux de l’association sur ceux de chaque cité. De là des jalousies et souvent des trahisons ; c’est ainsi que Cologne exploita à son profit l’inimitié de l’Angleterre contre la ligue, et que Hambourg, chercha à tirer avantage d’une querelle entre le Danemark et Lubeck.

Les Villes Anséatiques ne fondèrent point leur commerce sur la production et la consommation, sur l’industrie agricole et manufacturière de la contrée à laquelle elles appartenaient. Elles avaient négligé de stimuler l’agriculture de leur patrie, pendant qu’elles donnaient une vive impulsion, par leur commerce, à celle des pays étrangers ; elles trouvèrent plus commode d’acheter des objets fabriqués en Belgique que d’établir des fabriques dans leur pays, elles encouragèrent la culture des plaines de la Pologne, l’élève des moutons de l’Angleterre, la production du fer de Suède et les manufactures de la Belgique. Elles pratiquèrent durant des siècles le précepte des théoriciens de nos jours ; elles achetèrent les marchandises là où elles les trouvaient au meilleur marché. Mais, quand elles furent exclues des pays où elles achetaient et de ceux où elles vendaient, ni leur agriculture ni leur industrie manufacturière n’avaient pris assez de développement pour que l’excédant de leur capital commercial pût y trouver emploi ; ce capital émigra en Hollande et en Angleterre, où il accrut l’industrie, la richesse et la puissance de leurs ennemis. Preuve éclatante que l’industrie particulière abandonnée à elle-même ne rend pas toujours un pays prospère et puissant !

Dans leur poursuite exclusive de la richesse matérielle,